Encore une histoire bien hors du commun, que celle du scooter Valmobile. Bien plus qu'un véhicule intelligent, c'est tout un concept que Victor Bouffort, son inventeur, va offrir à la production scooteriste, jusqu'alors bien qualibrée.
L'homme est visionnaire et veut donner au quidam un véhicule de loisir, pouvant être chargé dans un coffre de voiture, embarqué dans une soute d'avion ou de bateau....et tout autre utilisation nécessitant un véhicule, rapide, démontable et léger.
Le prototype est assez rudimentaire et va considérablement évoluer. Ici à l'essai avec son concepteur, qui n'hésite pas à l'époque à sillonner les rues de la capitale, au guidon de son "terrible engin".
le Valmobile n'est encore qu'une cage faite de cornières métalliques, qui rapidement seront remplacées par des tubes.
le berceau avant est encore fixe et seule la roue avant, avec sa fourche, peuvent basculer, pour gagner un peu de place.
C'est un peu le véhicule de "l'aventurier moderne" ....des années 50.
bel éclaté de montage, relativement clair
Le petit engin dont le brevet est déposé à la fin de l'année 1952 est distribué par la société Martin Moulet & compagnie, à Bagnolet. Quant à sa fabrication elle est effectuée dans l'usine d'Oullins dans le département du Rhône, près de Lyon.
Le magazine mensuel "Le Scooter" du mois de mai 1953 en fait la présentation suivante "C'est à un carrefour de l'étoile, que nous avons rencontré le "VAL MOBIL"....ce lilliputien s'enorgueillit d'avoir fait Paris-Genève en une journée et Paris-Madrid en trois jours".....l'article ne dit pas combien de jours ont été nécessaires pour s'en remettre !
Le Valmobile se transporte seul ou à deux...et dans ce cas on a même le droit de se regarder dans les yeux.....
on ouvre la "valise", d'où il faut extraire les différents composants de l'engin.....le berceau avant tubulaire.....
.....je reprends...le berceau avant tubulaire....on se presse un peu chère demoiselle, sinon nos lecteurs vont croire que l'opération est longue à effectuer, alors qu'elle ne demande que 30 secondes ! Ah ! les femmes et la mécanique, c'est quelque chose, quand même.....
voilà, je l'ai vexée, du coup elle est déjà dessus.....
on va même tenter la course avec un Heinkel Tourist....
La preuve par l'image, on peut tenir à deux sur le Valmobile....On remarquera le regard de la demoiselle qui semble dire "m'a piqué ma place !"
La conception reste très simple et fonctionnelle : cadre tubulaire servant de support mécanique. Le réservoir d'essence y est également logé, placé contre le flanc droit. Le reste de l'espace étant réservé au logement du reste de l'astucieux montage. En l'occurrence, la fourche , dans laquelle vient s'emboiter le guidon avec son berceau repliable. Celui-ci devient dépendant de la partie arrière du scooter par un ingénieux système de clavettes à ressorts. L'ensemble est relié au sol par d'impressionnantes roues de 300 x 5 équipées de freins à tambour. Suspension règlable, assurée par les très contemporains anneaux Neiman.
si l'on démonte le panneau latéral, on peut voir que la conception est parfaitement étudiée.
le premier modèle du Valmobile est équipé, d'un moteur Alter de 60 cm3 à deux vitesses présélectives, qui sera suivi rapidement d'un Villiers de 98 cm3, cette fois, mais toujours à deux vitesses. Ensuite fera son apparition le Sachs de même cylindrée puis un Briban Sabb de 125 cm3. Le poids variera de 42 à 48 kg suivant la motorisation. Pour le démarrage, il s'effectue, à la poussette, par pédale de kick, ou par lanceur, en fonction du moteur.
dans l'armée....
C'est précisément le Briban Sabb 125 qui équipe notre Valmobile, puisque c'est en 1954 que ce scooter est à l'étude, dans l'armée française, pour ses troupes aéroportées. Il effectuera même un voyage en Indochine, pour les tests "sur le terrain". Le petit scooter-valise ne dépassera pas le stade du passage des "trois-jours" et en ressortira avec une mention bien abstraite de "résultats encourageants".
la conception de ce modèle unique, qui a pour notre plus grand bohneur passé les années, pour arriver jusqu'à nous est un peu particulière. En effet, on retrouve son cadre démontable en "fer à cheval", mais une échancrure tout à fait spécifique a été formée dans la tôle d'assise. Autre particularité, une fois démonté et replié, le corps du scooter peut se déplacer tel un groupe électrogène, à l'aide de deux poignées escamotables. Son phare de dimension plus importante que la version civile (emprunté au modèle à tablier). Sa selle en forme de flêche. Ses panneaux latéraux en toile, laissant apparaitre le système de refroidissement par air forcé, en avant de la pédale de kick-starter. Et enfin, un crochet d'attelage prévu à l'arrière, pour tracter...une remorque ou peut être un canon sur roues ? pour les intéressés se référer à l'article sur les scooters militaires http://scoot-toujours.over-blog.com/article-les-scooters-dans-l-armee-72355267.html .
Le modèle à tablier le voici. Sa carrosserie supplémentaire à l'avant se termine, au dessus de la roue, par un garde-boue fixe, formant, à l'arrière un plancher, repose-pieds. Cet accessoire lui permet de ressembler un peu plus aux standards des concurrents de l'époque.
on voit bien ici que la seule différence entre les deux modèles reste la carrosserie avant rajoutée pour simuler un scooter plus abouti.
Toutes les variantes de Valmobile sont présentent, au salon de 1953, sur le stand Martinet, qui n'est autre qu'une marque des établissements Martin Moulet. On remarquera également, au premier plan, le rare scooter Royal Fabi, animé par un moteur Martinet, à transmission par arbre.
Valmobile au pays du soleil levant....
Le marché français n'étant pas mûr, les établissements Martin Moulet cessent la production en 1958. C'est la société HIRANO Seisakusho limited, basée à Nagoya au Japon, qui en rachetant la licence du Valmobile, va le fabriquer à son plus grand nombre, en 1960.
L'utilité étant plus à propos, dans un pays où la miniaturisation est déjà de rigueur, à l'époque, le Valmobile intéresse un plus large public. L'invention de Victor Bouffort prend alors tout son sens.
toujours, pour le bateau, tel qu'il a été prévu en Europe au départ ....
mais surtout, pour le coffre de la voiture, car ses dimensions restreintes de 60cm de long x 32cm de hauteur et 28cm de large, permettent de le garder dans le coffre d'une grande auto....
la firme japonaise développe rapidement sa production en signant un contrat avec le firme automobile FORD, qui offre un Valmobile pour une voiture achetée.
Comme c'est dit dans la pub américaine "problème de voiture ! Valmobile !" .... cela présage surement que le Valmobile est plus fiable qu'une voiture américaine ?.....
moment de grâce pour le Valmobile....c'est la "grande classe américaine".
Mais l'euphorie est brêve....en 1961 Hirano est mis en faillite, n'ayant pas su se diversifier.
garden partie, en Valmobile....
Victor Bouffort, initialement ingénieur aéronautique, a certainement ressenti une certaine fierté en voyant cette publicité, à l'époque. Tout un symbole de l'aboutissement d'un rêve.
variantes utiles :
version side-car, qui parait très bien conçu, reste a en trouver l'utilité.
pour le golf, side avec panier en toile repliable lui-aussi, pour promener son sac sur le green, conçu également par notre inventeur de génie, au moment de la conception du scooter. Bonne alternative du Valmobile, dommage que l'idée n'ai pas été reprise sur les parcours français.
aujourd'hui le scooter-valise est devenu pièce de musée...comme en témoigne cette photo d'un visiteur du Asagiri Kogen Museum....
....situé au pied du célèbre Mont Fuji Yama.
Même si d'autres on tenté l'aventure du scooter repliable, c'est certainement Victor Bouffort avec son Valmobile, puis le Miniscoot OLD qui en découlera, (voir article http://scoot-toujours.over-blog.com/article-miniscoot-old-precurseur-des-micro-scooters-113514334.html ) qui aura créé et mis au point le micro scooter le plus abouti.
et pour finir, une pensée amicale aux enfants de Victor : Charles-Albert, Christian et Chantal Bouffort, qui ont eu la gentillesse de me confier certains documents familiaux exceptionnels pour la réalisation de cet article.
Bientôt nous reviendront sur le parcours irréel de cet inventeur de génie, avec des documents passionnants et inédits.